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Le Carnaval des animaux de Camille Saint-Saëns

Par Claire Alcais • 26 juin 2021

Le compositeur précoce Camille Saint-Saëns offre avec son Carnaval des animaux une œuvre pédagogique très riche : il met en scène lion, tortues, kangourou, éléphant et autres animaux pour le plus grand plaisir des enfants. Entre devinettes et analyses des notions de tempo, de timbre, de hauteur et de tonalité, voyons comment ces tableaux descriptifs se succèdent pour laisser entendre une authentique « fantaisie zoologique ».

Une œuvre originale

Illustrer musicalement des animaux, que ce soit par leurs cris ou leurs mouvements, et tout en faisant référence à d’autres œuvres, est la prouesse géniale de Saint-Saëns. Son Carnaval des animaux, composé en Autriche en 1886, obtiendra un succès posthume mondial. En effet, l’organiste de renom en interdit l’exécution publique de son vivant, excepté Le Cygne.
Au-delà de la peinture animalière loufoque de cette suite musicale apparaît la satire des humains et de la musique descriptive, rehaussée par des citations musicales teintées d’humour. Les quatorze pièces se présentent dans cet ordre :

Introduction et marche royale du lion 2. Poules et coqs 3. Hémiones 4. Tortues 5. L’Eléphant 6. Kangourous 7. Aquarium 8. Personnages à longues oreilles 9. Le Coucou au fond des bois 10. Volière 11. Pianistes 12. Fossiles 13. Le Cygne 14. Final

Les instruments, qui diffèrent pour chaque évocation comprennent quant à eux : 2 pianos, 2 violons, 1 alto, 1 violoncelle, 1 contrebasse, 1 flûte, 1 clarinette, 1 harmonica (ou célesta) et 1 glockenspiel (sorte de xylophone). Autant d’occasions d’aiguiser l’oreille des enfants, l’instrumentation n’étant totale que dans le final.

Exemple de l’Aquarium :

Pendant 2 minutes 10 secondes, sur un tempo andantino, flûte, carillon, deux pianos et cordes sans contrebasse, Saint-Saëns plonge littéralement le jeune auditeur dans un monde liquide et onirique. L’ondulation, la nage des poissons et leurs mouvements sont merveilleusement évoqués dans cet aquarium. La musique semble restranscrire également les bulles d’air qui remontent à la surface.

Poésie aquatique et musicale mouvante, cette pièce propose au milieu de l’œuvre une construction avec deux thèmes : le premier, incarné par la flûte et les cordes en sourdine, révèle une mélodie très douce, à laquelle se mêlent les pianos et le carillon. Le second thème est joué par les pianos dont le chromatisme descendant laisse rêveur. Enfin, les deux thèmes s’enchaînent avec une reprise ainsi que plusieurs variations, entre lumière irréelle et absence de pesanteur.

Ce morceau Aquarium a été utilisé dans des publicités de nombreuses fois, également dans les dessins animés La Belle et la Bête de Disney et Fantasia 2000, ainsi qu’avant chaque diffusion de films lors du Festival de Cannes. Les entrées pour aborder l’œuvre et plus précisement ce tableau aquatique sont multiples, car l’imagination des enfants est sollicitée à travers de nombreux aspects de la musique.

Une grande fantaisie zoologique

Saint-Saëns, qui fut également le professeur de Gabriel Fauré, développe dans cette œuvre des éléments musicaux que les enfants peuvent en effet repérer, discerner pendant leur temps d’écoute tout en essayant d’identifier les timbres musicaux. Les plus petits peuvent mimer avec leur langage corporel ou imiter l’animal qui se cache derrière chaque extrait. Cela est aussi l’occasion d’analyser le tempo, la hauteur, le timbre et la mesure en fonction de l’animal à découvrir.

De quel animal s’agit-il ? La musique donne t-elle envie de marcher ou de danser ? L’animal semble t-il courir ou de se déplacer lentement ? En remplaçant les danses de la forme ancienne de la suite par des animaux et en choisissant un tel effectif instrumental, Saint-Saëns ouvre un large éventail pour aborder la musique de manière comique et ludique. Gammes, arpèges, contrastes, sont autant de composantes musicales traitées dans chaque tableau animalier.

Ajoutons à cela les brefs textes de Francis Blanche pour donner une touche d’humour supplémentaire et rendre l’œuvre encore plus attrayante pour les enfants : « De la baleine à la sardine et du poisson rouge à l’anchois dans le fond de l’eau chacun dîne d’un plus petit que soi… »

En parodiant les écritures musicales d’Offenbach, de Berlioz Saint-Saëns s’est amusé avec cette suite pour orchestre, tandis qu’il finissait de composer la même année son chef d’œuvre, sa symphonie n°3 avec orgue.