Plaisir commun et subjectif
Dans toutes les cultures on écoute de la musique, et que ce soit l’enfant qui danse sur sa musique préférée, l’adolescent qui écoute un morceau dans son casque ou l’adulte qui assiste à un concert, il résulte des sons entendus une authentique et indéniable source d’émotions. Entendre des sons génère ainsi à plus ou moins haute intensité un ressenti positif recherché par chaque auditeur et l’on peut même se faire plaisir en écoutant sa musique triste favorite.
L’oreille humaine permet d’expérimenter ce plaisir à partir de stimuli sonores, jugés subjectivement plus ou moins plaisants et esthétiques. Apprécier un morceau musical révèle donc les goûts et les préférences de chaque individu ; untel va aimer écouter une musique qui dérangera telle autre personne. « La musique est un monde de plaisir et avant tout de relations affectives même si l’émotion reste ponctuelle », écrit le neurologue et organiste Bernard Lechevalier dans son ouvrage « Le plaisir de la musique ».
Neurosciences et circuit de récompense
Écouter de la musique provoque ainsi des émotions, frisson de plaisir, joie et entraîne le corps dans un mouvement parfois irrésistible. En effet, le sentiment de plaisir procuré par la musique s’apparente pour le cerveau à la satisfaction engendrée par la drogue, le gain d’argent etc… Les études menées sur le cerveau par imagerie médicale ont en révélé que la stimulation auditive de musique plaisante déclenche la sécrétion de dopamine, le neurotransmetteur du mécanisme de la récompense.
A l’origine de la sensation de plaisir, on trouve ce parcours de la dopamine ou circuit de la récompense impliquant deux principales structures du cerveau : le noyau accumbens et l’aire tegmentale ventrale. En stimulant ou en inhibant certaines zones cérébrales, des neuroscientifiques québécois ont par exemple réussi à démontrer la possibilité d’intensifier ou d’atténuer le plaisir ressenti à l’écoute de la musique ainsi que le désir d’en écouter davantage.
Néanmoins, 3 à 5 % de la population est incapable de ressentir du plaisir à l’écoute de la musique ; on dit que ces personnes sont atteintes d’anhédonie. Cette absence de plaisir est liée à une connectivité fonctionnelle diminuée dans les zones corticales impliquées dans le traitement de l’information sonore et dans celles qui relèvent des circuits de la récompense.
Sensibilité et attentes
Tous les genres musicaux sont constitués de rythmes et d’accords qui génèrent attentes et anticipation au niveau cérébral. D’après de récentes études germano-norvégiennes le plaisir de la musique résiderait également dans la faculté d’être surpris lorsque la musique est prévisible, ou au contraire de retrouver de la certitude lorsque le motif musical est surprenant. Le plaisir musical proviendrait ainsi « d’erreurs de prédiction de récompense positive », c’est-à-dire lorsque ce que l’on entend se révèle plus agréable que prévu.
Les chercheurs ont fait écouter des suites d’accords caractéristiques de chansons pop à succès, afin de se rendre compte de l’activité cérébrale et des réactions de plaisir ou de déplaisir. Il en résulte que lorsque les participants étaient à peu près sûrs de l’accord à venir, ils ressentaient du plaisir si ce dernier les surprenait. Inversement lorsqu’ils doutaient de la succession de l’accord ils éprouvaient du plaisir si ce dernier était attendu. Vibrer au son de la musique et ressentir le frisson musical dépend bien des attentes inhérentes à la mémoire musicale et à la sensibilité de chaque auditeur.
Entre attentes et ressentis, les scientifiques ont observé pendant ces écoutes les zones corticales relatives au traitement du son, à l’apprentissage et à la mémoire. Les résultats des accords les plus appréciés sont extraits des morceaux « Invisible touch » de Genesis, « Hooked on a feeling » de BJ Thomas et « Ob-la-di, Ob-la-da » des Beatles. Pour en savoir plus, notamment sur cette expérience :
https://www.planetesante.ch/Magazine/Psycho-et-cerveau/Emotions/Neuroscience-musique-et-dopamine
La musique, grâce au plaisir qu’elle génère et à ses effets sur le fonctionnement cérébral, est désormais développée en tant que perspective thérapeutique et comme outil de stimulation cognitive avantageux, notamment sur l’acquisition des connaissances et l’apprentissage linguistique chez les enfants.
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